Visite royale - Notre vrai roi
Bernard Descôteaux 30 juin 2011 Actualités en société
Le prince William et la duchesse Kate Middleton entreprennent aujourd'hui une visite de huit jours au Canada. Dans les provinces anglophones, on se réjouit de la venue de celui qui, un jour encore lointain, sera roi du Canada. La modernité qu'affiche ce jeune couple princier redynamisera l'image surannée projetée par la reine Elizabeth II, reine du Canada depuis 59 ans déjà. Au Québec, leur séjour suscite par contre une indifférence généralisée, quand ce n'est pas de la dérision ou de la contestation, inspirées par une relation historique avec la Couronne britannique qui n'a pas toujours été facile. On aimerait bien se débarrasser de ce symbole.
Se départir de la royauté n'est toutefois pas à l'ordre du jour, même si à chaque visite de la reine ou d'un membre de la famille royale quelques rares personnes soulèvent la question. Les Canadiens en forte majorité adhèrent à la présence d'Elizabeth II comme incarnation de l'autorité suprême du Canada et nos politiciens sont d'autant moins enclins à ouvrir un tel débat qu'ils sont les premiers à profiter du statu quo.
Abolir la royauté obligerait à mettre en place un véritable chef d'État qui serait bien entendu un Canadien qui devrait être élu. Pour ne pas bousculer notre système, cette élection ne serait pas faite au suffrage universel, peut-on penser, mais faite par le Parlement, c'est-à-dire par les députés et les sénateurs réunis en congrès. Cela donnerait au chef de l'État une légitimité et certainement plus de pouvoirs qu'en a actuellement le gouverneur général, qui représente la reine dans l'exercice de son rôle.
Si cela arrivait, cela ne manquerait pas d'affecter les pouvoirs du premier ministre qui, s'il n'est pas le chef de l'État en titre, l'est dans les faits. Le vrai roi du Canada, c'est lui. Ses pouvoirs sont énormes. Le premier ministre au Canada, comme dans les provinces canadiennes, n'est plus le primus inter pares, comme le veut la formule traditionnelle. Il n'est plus le premier entre des égaux au sein du Conseil des ministres. Il est le primus tout court, celui qui décide de tout et régit tout dans le gouvernement, ce qui conduit à une forme d'absolutisme qui se garde de dire son nom.
Cela est encore plus vrai depuis que Stephen Harper est devenu premier ministre en 2006. Les ministres n'ont plus d'autonomie. Ils doivent faire approuver le moindre de leurs gestes par le «PMO», le Prime Minister's Office où tout se décide. Stephen Harper s'attribue même des rôles ministériels, comme il vient de le faire en prenant la présidence du Comité permanent sur la sécurité nationale qu'il vient de créer. Quant au Parlement, il est sous ses ordres maintenant qu'il est majoritaire tant à la Chambre des communes qu'au Sénat.
D'avoir un roi ou une reine d'opérette au-dessus de lui convient parfaitement à Stephen Harper. Cela l'assure de pouvoir gouverner en toute quiétude. Alors quand la famille royale s'amène au pays, aussi bien l'accueillir avec pompe, histoire de bien entretenir le mythe.