L’indépendance, une question d’histoire et d’identité
Daniel Gomez
Le Devoir - mercredi 3 janvier 2007
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C’est vrai, comme l’a déjà dit un ministre français lors du dernier référendum, et comme l’a répété dernièrement dans Le Devoir Mathieu Bock-Côté (« Harper, un guide pour les souverainistes ? », le 28 décembre 2006) : on ne fait pas l’indépendance d’un pays pour des raisons administratives, fiscales ou écologiques. On fait l’indépendance d’abord et avant tout pour des raisons historiques et identitaires. On fait l’indépendance pour être reconnu comme peuple et comme nation. On fait l’indépendance, non pas pour avoir un strapontin à l’Unesco, mais pour avoir une vraie place dans cet organisme ; non pas pour être reconnu comme nation, plus ou moins tribale, à l’intérieur d’une « vraie nation », la canadienne, mais pour avoir une place à l’ONU ; non pas pour voir un Québécois porter le drapeau canadien aux Jeux olympiques, mais pour voir des athlètes québécois avec leur drapeau à ces mêmes jeux ; non pas pour avoir deux ou trois joueurs québécois au sein de l’équipe canadienne de hockey, mais pour avoir une équipe québécoise aux championnats mondiaux de hockey sur glace.
Tout cela semble si basique et si élémentaire qu’on se demande alors pourquoi la direction péquiste s’obstine à ressasser l’argumentaire instrumentaliste et comptable (déséquilibre fiscal, environnement, etc.) et à attendre anxieusement le prochain budget fédéral en souhaitant qu’Harper ne lâche rien sur le plan fiscal pour le Québec.
S’il veut faire avancer la cause de la souveraineté du Québec, le Parti québécois devrait peut-être songer à élever le débat lors des prochaines élections. Et pour l’instant, il ne semble pas porté à cela. Comment en effet expliquer le silence étourdissant des députés péquistes lorsque Guy Bertrand a soulevé l’idée, pas si farfelue que ça, de créer une équipe de hockey québécoise ? C’était là une excellente occasion de « faire du millage » sur la question identitaire. Comment expliquer également le même silence lors du débat sur les accommodements raisonnables ? Là encore les dirigeants péquistes ont été muselés par la rectitude politique. Et on pourrait multiplier les exemples.
Il reste de trois à cinq mois pour ramener la question de l’indépendance du Québec au niveau duquel elle n’aurait jamais dû sortir, celui de la reconnaissance internationale. André Boisclair et ses éminences grises auront-ils la profondeur suffisante pour mener cette tâche ? Jusqu’ici, cela ne semble pas évident, mais il est peut-être encore temps de modifier le tir...
Daniel Gomez, Département de sociologie, UQAM, Membre des Intellectuels pour la souveraineté
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